lundi 16 février 2015

Sarre Union / Europe février 2015




Voilà qu’à nouveau  on tue des juifs parce qu’ils sont juifs. Voilà qu’à nouveau  on souille leurs cimetières. C’est ignoble. Nous devons tous le dire : « C’est ignoble d’attaquer les juifs parce qu’ils sont juifs » Nous ne devons pas nous taire. La dernière fois que nous nous sommes tus on a plombé les wagons et allumé les fours.
Croire ou laisser dire que cette affaire concerne les juifs et donc que l’on ne s’en mêle pas est une faute. Cela nous concerne tous. Ne nous  trompons pas, demain à la place de juif il y aura écrit musulman ou arabe sur le tableau, ou chrétien.  Accepter de telles barbaries c’est les accepter toutes  et on en voie de plus en plus sur nos écrans. Ça se rapproche.
La bête a toujours faim.  Elle ne connait pas le repos et ce qu’elle aime le plus c’est ronger son os lorsque  nous avons le dos tourné et les yeux fermés. Alors que nous sommes silencieux et indifférents
En gardant le silence  nous devenons complices. Ne laissons pas attaquer les juifs sans réagir. C’est nous tous que l’on attaque.


Kaddish – 130x97cm – acrylique sur toile - 2015


Dans la tradition juive le Kaddish est une prière.  Le plus connu est celui des morts. J’ai peint ce tableau il y a quelques semaines. Cela n’a rien de prémonitoire, il y a longtemps que ça monte. Je le dédie à tous ces gens dérangés  dans leur éternité.
 

jeudi 8 janvier 2015

Ici et maintenant



Ce matin j’arpente mon atelier comme un chat malade à la recherche d’un coin pour se cacher. Impossible de peindre, cela me parait dérisoire. Je souffre parce que j’aimais ces gens que l’on vient de tuer.
Il y a longtemps que je n’achetais plus, ne lisait plus Charlie de façon régulière. Pour autant  ceux qui y sont morts ont contribué à façonner mon esprit. Ils m’ont appris, il y a  40 ans, à envoyer balader les officiers supérieurs et les adjudants de ma caserne, ils m’ont appris à ne pas dire « Maître » chaque fois que je croise un avocat ou un notaire.  Ils ont fortement éclairé ma relation avec les dieux de toutes sortes tant leurs déconnades  à ce sujet me sont apparues infiniment plus saines  que les génuflexions des bigotes. Ils m’ont donné des armes pour résister.
Ils n’ont pas été les seuls mais, c’est incontestable,  ils m’ont un peu façonné. Ils ont aidé à ma capacité d’autodérision. Tous ceux qui ont testé ce truc savent que ça aide à tenir le coup.
En ce moment des intégristes musulmans se dirigent vers la Syrie, l’Irak ou ont décidé d’étendre le domaine de la lutte dans nos sociétés. Rien ne leur semble plus important. C’est leur combat, il est dans leur tête de façon obsessionnelle. Ils se lèvent le matin en se disant « ici et maintenant ». La folie de ce combat est leur seule issue car le martyre est le seul aboutissement de cette pensée. C’est l’idée de la mort qui les rassemble.

C’est ainsi que nous devons les combattre : ICI et MAINTENANT. Samedi à la marche, comme nous l’avons fait hier soir dans tant de villes de notre pays. Sans slogans, nous savons ce que nous ne voulons pas lâcher. C’est l’idée de la vie qui nous rassemble.

 JE SUIS CHARLIE

dimanche 7 décembre 2014

Turner




Hier soir je suis allé voir le film sur Turner. Il est magnifique. N’attendez pas  du peintre que je suis qu'il dise autre chose. On y découvre un homme au caractère bien trempé et un bourreau de travail, la reconstitution d’une Angleterre à la Dickens, les costumes, l’accent cockney ou la douceur du Kent, rien n’y manque. C’est un régal pour l’œil et l’esprit. Il y a dans ce film une scène superbe dans la galerie du peintre, attenante à son atelier londonien.

Un richissime homme d’affaires propose à Turner de lui acheter la totalité de sa production. Passée, présente et à venir. Il offre une très belle somme. Turner refuse. Il dit que c’est de toute façon impossible car il a légué son œuvre à la nation anglaise et  veut que le public puisse la voir gratuitement. Le financier s’en va, dépité.


J’ai vu ce film en VO au Caméo  Ariel de Metz qui propose depuis 15 ans une programmation remarquable, mélange de films tous publics de qualité et de films plus confidentiels. Ce cinéma  va disparaitre. Notre municipalité vient de signer (?) va signer (?) un accord avec le groupe Kinépolis.  En échange de la rénovation de l’autre cinéma du centre – le Palace -  ce groupe récupèrerait  la programmation  du centre-ville en plus des blockbusters et comédies de grande audience projetées dans ses multiplex.Il se retrouverait de facto en situation de monopole. Autant dire que si l’affaire aboutit nous allons perdre tout un versant du cinéma dans un laps de temps très bref.

Je repense à Turner. S’il avait accordé le monopole de son œuvre à cet acheteur,   la Tate Gallery  n’existerait pas. Quelle richesse collective perdue ! Imaginer Londres sans la Tate m’est aussi difficile qu’imaginer Metz sans une programmation de cinéma digne de ce nom.


Ne serait-il pas plus judicieux de « léguer » le Palace à la culture cinématographique  plutôt qu’au monopole ?  Continuer d’offrir un espace de diffusion  à des cinéastes du monde entier, réunis dans  une programmation intelligente, serait   un choix aussi cohérent que le  rassemblement de l’œuvre de Turner à la Tate. 


Aller au centre voir un film en VO - entendre la vraie  voix de Sean Penn ou de Scarlett Johansson , des éclats de rire coréens, des colères africaines -  boire ensuite une mousse avec les copains, reluquer les  vitrines, se réjouir de ces bandes de garçons et de filles que l’on croise encore le soir dans les rues, fait partie des plaisirs non monnayables, des étincelles qui font vibrer une ville.


 The great Western Railway - 1844 - 122 x 91  cm